Dans ce contexte que traque des opposants, activistes et journalistes par le régime de Macky Sall, l’Asutic a sorti une note pour rappeler la surveillance dont ils peuvent faire l’objet avec le téléphone, mais surtout le réseau social Whatsapp.
Limiter au minimum l’utilisation d’un téléphone portable connecté à l’internet mobile, arrêter d’utiliser WhatsApp et de migrer vers l’application Signal. Voici les conseils que l’Association des Utilisateurs des TIC (Asutic)) donne aux opposants, activistes et journalistes critiques. Selon l’organisation dirigée par Ndiaga Guèye, il s’agit là d’une « décision cruciale pour atténuer les risques de surveillance numérique gouvernementale. Une question de survie dans un régime autoritaire ».
L’Asutic déconseille fortement l’utilisation du réseau social whatsapp aux acteurs qui peuvent être la cible d’un pouvoir. Pour elle, le caractère confidentiel des communications numériques est une question de sécurité et de survie pour l’opposition, la société civile et les médias. Or, Whatsapp est presque un espion au service des régimes.
Selon Ndiaga Guèye et Cie, WhatsApp et Telegram (entreprises commerciales) ne se contentent pas uniquement de monétiser les données de leurs utilisateurs, ils se sont aussi fait distinguer dans la réponse aux demandes d’informations de certaines polices. « En matière de partage de données de ses utilisateurs avec la Police, WhatsApp est encore pire.
WhatsApp a mis à la disposition des forces de l’ordre du monde entier un système de demandes en ligne d’informations sur ses utilisateurs », révèle l’organisation. D’où ce conseil de migrer vers Signal qui est une entreprise a but non lucratif et qui stocke très peu de données de ces utilisateurs, ce qui le rend incapable à partager des données sensibles sur l’utilisateur.
En guise de comparaison, détaille l’Asutic, le seul élément de métadonnées stocké par Signal est le numéro de téléphone ; encore que ce numéro n’est pas lié à l’identité de la personne détentrice. « Signal est conçu pour ne jamais collecter ou stocker des informations sensibles sur ses utilisateurs ». C’est tout le contraire de Whatsapp qui collecte toute une masse d’informations sensibles sur l’usager.
« Les contacts, les activités, les fonctionnalités qu’ils utilisent, le statut, les communautés ou les groupes, les fonctionnalités professionnelles ; si un utilisateur est en ligne ou non ; l’heure et le jour qu’il a envoyé et reçu des appels et des messages, la fréquence et la durée, etc. La liste de données collectées est longue… », avertit Asutic.
Ces conseils d’Astic interviennent à un moment où le régime de Macky Sall opère une traque systématique des opposants, activistes et journalistes, notamment sur le net. Les journalistes Pape Ndiaye et Serigne Saliou Guèye sont en prison, des activistes ou rappeurs sont aussi derrière les barreaux (ou en aller retour), sans compter un grand nombre de militants du Pastef, le parti d’Ousmane Sonko parmi lesquels le numéro du parti, Bassirou Diomaye Faye ou encore des coordonnateurs régionaux. La plupart d’eux sont poursuivis pour diffusion de fausses nouvelles, outrage à ceci ou des délits liés au trouble à l’ordre public.
En dehors des réseaux sociaux, il y a également des risques liés à l’utilisation des téléphones ‘’avec la version Android de Google ou avec iOS d’Apple ». En effet, les géants du net, Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft appelés Gafam collectent massivement des données pour des raisons commerciales.
Mais il n’y a pas que les géants, les régimes autoritaires aussi peuvent utiliser le téléphone pour suivre son utilisateur. «Il est à noter que tant qu’on utilise un téléphone portable connecté à un réseau de téléphonie mobile, il est impossible d’échapper à la surveillance gouvernementale. Non seulement, le gouvernement peut disposer de la capacité d’écouter les conversations téléphoniques et lire les SMS, mais pire encore, tout utilisateur est géolocalisable », prévient Asutic. Une géolocalisation certes approximative, mais beaucoup plus précise avec le 5G.
L’Astic déconseille aussi de stocker ses contacts sur une carte puce, car cela permet à l’opérateur d’avoir une copie. Le régime en place pourra donc en disposer, alors qu’il est possible de tracer un utilisateur en suivant les appels émis et reçus, « même s’il utilise un numéro non identifié à son nom ».
Ndiaye Guèye recommande ainsi de stocker les contacts dans la mémoire du téléphone et de les copier sur un support externe comme une clé Usb ou un disque dur.
Malgré tout, les gouvernements disposent encore de moyens comme l’utilisation de logiciel espion comme «Pegasus», développé par la société israélienne «NSO Group». « Ainsi donc, le téléphone portable peut devenir un espion dans votre poche qui consigne toutes les activités, échanges de SMS, enregistrement des conversations, positionnement par GPS, historique de navigation Internet, etc », alerte l’Astic.
Face à cette surveillance massive et possible par plusieurs outils, il n’existe qu’une échappatoire, d’après Ndiaga Guèye : utiliser un téléphone sans SIM et faire toutes ses communications via les applications de «Voice over Ip», telles WhatsApp, Signal, Telegram, etc. Mais cela suppose que la personne puisse avoir accès partout à un wifi ; ce qui est tout sauf évident.